1. Le premier concerne le champ stratégique européen. La Grèce a eu à affronter la coalition de tous les États européens et des institutions européennes. En face, les mouvements de soutien au peuple grec sont restés limités et n’ont pas permis de peser sur le cours des choses. Cette situation renvoie à un échec historique, celui de la construction d’un mouvement social européen capable d’agir comme force unifiée face aux institutions européennes.
La disparition du Forum social européen, la faiblesse du processus qui l’a remplacé (l’Altersummit), la carence totale de ce géant aux pieds d’argile qu’est de la Confédération européenne des syndicats ont empêché l’émergence d’un contre-pouvoir à l’échelle européenne alors même que les politiques se décident essentiellement à ce niveau. Face à cet échec, la tentation est grande d’abandonner le terrain européen. L’exemple de la Grèce vient de nous rappeler qu’une rupture au niveau national peut être étouffée en l’absence d’appui dans d’autres pays. La construction d’un mouvement social européen capable de faire contrepoids aux institutions européennes est décisive pour rééquilibrer les rapports de forces en Europe, même si d’expérience nous savons que cela ne sera pas facile.
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Août 26
Défendre notre paysage et notre politique alimentaire contre le « marché » de prédations. Michel BESSON & William ELIE
Publié le mercredi, 26 août 2015 dans Agriculture
Défendre notre paysage et notre politique alimentaire contre le «marché» de prédations
De retour de Millevaches jusqu’aux sources de la grande dépression agricole estivale, petit panorama historique de l’effondrement orchestré savamment par la FNSEA.
En à peine plus d’un demi-siècle, la France a connu de profondes mutations (économiques, démographiques, sociologiques…) et notamment dans le monde agricole : aujourd’hui, il y a moins de 600 000 exploitants agricoles en France, représentant à peine 4 % de la population active alors qu’ils étaient 10 millions d’actifs agricoles en 1945. Aucun autre secteur économique n’a connu une régression d’emplois aussi massive. La révolution verte liée à la mécanisation, à l’emploi d’engrais de synthèse dans l’agriculture, a conduit à une hausse importante de la productivité et à une concentration des terres au sein de quelques grandes fermes d’exploitations agricoles. La motorisation a transformé radicalement les méthodes de travail et les paysages par le remembrement.
Pourtant la crise structurelle que vit le monde agricole témoigne de la faillite des politiques de développement agricole, celle de l’endettement permanent et de la crise du logiciel productiviste, facteur d’érosion, de l’artificialisation et de l’épuisement des sols. La détresse des paysans masque la fuite en avant des systèmes de production et impasses sociales et environnementales. Le modèle agro-exportateur qui entretient l’illusion de «nourrir le monde» est révolu, celui-ci nous rend dépendant de la loi du marché qui broie l’emploi et siphonne les revenus. L’âge moyen des paysans est de 50 ans, leur nombre diminue de 3 % par an, les revenus sont faibles (80% autour du SMIC), l’accès à ce métier est de plus en plus difficile pour les jeunes candidats avec les barrières foncières et de transmissibilité.
Pourtant sans paysans, il n’y aura plus d’autonomie alimentaire en France et donc plus de pays !
Août 23
Tribune libre Michel COSTADAU.Opinion 10 : Finances
Publié le dimanche, 23 août 2015 dans Non classé, Point de vue
Oui je sais, normalement il faudrait faire le texte sur la religion. Mais, d’une part, j’ai compté que dans le texte sur l’État voyou d’Israël il y avait 35 fois le mot religion, ce qui veut dire qu’on en a déjà un peu parlé, et, d’autre part, il y a moins d’actualité sur ce sujet que sur d’autres plus chauds. Les sujets chauds c’est la Grèce, le réchauffement climatique, l’État Islamique ou l’Ukraine par exemple. Mais au-dessus de tout ça, ou en dessous, si on veut parler de dénominateur commun, il y a le renversement dans l’ordre des pouvoirs qu’a réussi la finance il y a quelques années et dont nous voyons les effets dans les sujets évoqués plus haut. Je voudrais dire finance internationale ou finance mondiale, mais justement ce ne sont que des pléonasmes, car il y a « la » finance c’est tout et elle va bien, merci.
La finance est devenue la puissance mondiale n°1, ça veut dire que tous les autres détenteurs de pouvoir, par exemple les politiques, les religieux ou les intellectuels ne sont plus maîtres de leur jeu, sauf peut-être les mafias et quelques organisations parallèles.
Août 22
Onze points mélancoliques sur le devenir de la situation grecque, par Alain Badiou
Publié le samedi, 22 août 2015 dans Point de vue
1 On avait cru comprendre que Syriza, vainqueur des élections en Grèce, avait pour mot d’ordre un vigoureux «non» à l’austérité ; qu’il allait donc refuser catégoriquement toutes les conditions antisociales, régressives, portant atteinte aux principes les plus élémentaires de l’aspiration à l’égalité et à une vie populaire acceptable, dont les autorités financières diverses et leur couverture européenne faisaient la condition de leurs prêts. Beaucoup se réjouissaient alors de la possibilité qu’émerge, en Europe, une orientation politique enfin absolument différente du consensus réactionnaire dans lequel tous les Etats, depuis trente ans, maintiennent leurs opinions publiques, de gré ou de force.
2 Bien entendu, on pouvait déjà trouver bien des arguments pour modérer cette espérance. Ne serait-ce que ce mot très malheureux, «austérité», qui laissait entendre qu’on pourrait avoir son contraire (qui est quoi ? le «bien-être» ?) sans changer grand-chose. Alors que tout semblait indiquer que les adversaires, les gens au pouvoir et leurs commanditaires de l’économie sauvage mondialisée, n’avaient pas la moindre intention de changer quoi que ce soit, et entendaient même consolider et aggraver la tendance dominante dont ils sont les gestionnaires et les profiteurs. On remarquait aussi le péril que représentait l’acceptation, pour parvenir au pouvoir, de règles immuables : élections, majorités incertaines, peu de contrôle sur l’appareil d’Etat, encore moins sur les puissances financières, tentation organisée du compromis corrupteur, bref, une marge de manœuvre très étroite. Et enfin on voyait que Syriza n’entretenait pas vraiment, avec la masse des gens, des liens politiques étroits et organisés : son succès était un succès d’opinion, versatile par définition, et surtout incontrôlé, sans garantie contre l’assaut, interne comme externe, des opportunismes pour lesquels parvenir au pouvoir et y rester est la seule règle. Pour toutes ces raisons, j’appartenais au camp des sceptiques.
Août 21
GRECE, EUROPE, ÉMANCIPATION : LE DÉBAT CONTINUE…
Publié le vendredi, 21 août 2015 dans Point de vue
Publié le lundi 17 août 2015,
Des questions, quelques réponses. (contribution individuelle)
1. Euro ou pas euro ?
Si on considère cette question comme concernant seulement l’outil monétaire au sens restreint on n’aperçoit qu’une partie du problème. La question ne devient claire que si on l’élargit à l’ensemble de la structure dont l’euro est un rouage. La structure, c’est celle de la zone euro dans sa globalité (traités, institutions, monnaie, rapports de force historiques, ou conjoncturels) et c’est le bon niveau pour tenter de répondre à la question. Certes les politiques libérales et pro capitalistes peuvent être (et sont) conduites hors de cette structure, même en Europe, à l’exemple de la Grande Bretagne. Ce n’est donc pas la structure qui les produit. Mais si, par hypothèse, un gouvernement anticapitaliste, ou même juste social démocrate à l’ancienne, voyait le jour en Grande Bretagne, il y aurait toute une plage de mesures possibles antilibérales avant de se heurter au cœur du capitalisme, ou même aux traités signés à l’échelle de l’UE ou de l’OMC. La globalisation a réduit ces marges par rapport, par exemple, aux débuts de la présidence Mitterrand.
Août 21
Chine. « Accidents industriels » et désastre écologique, par Richard Smith
Publié le vendredi, 21 août 2015 dans Ecologie
Le mercredi 13 août 2015, aux alentours de 23h30 (heure locale), de puissantes déflagrations sont survenues dans la zone portuaire de Tianjin, un des dix plus grands ports du monde. Il semble qu’un incendie dans un entrepôt propriété de la firme Tianjin Dongjiang Port Ruihai International Logistics – qui était autorisée à stocker des «produits dangereux» malgré ses manquements en matière de sécurité – soit à l’origine des explosions. Les autorités ont, de suite, arrêté des «cadres» de cette firme. Ce qui s’inscrit dans la politique traditionnelle comme l’explique un responsable de l’ONG China Labour Bulletin, basée à Hong Kong: «En général, dans ce type de cas, les autorités trouvent des boucs émissaires, certains responsables vont être licenciés ou rétrogradés, mais les choses vont finalement très peu changer, en dépit de la grande publicité qui entoure cette tragédie.»
En date du 16 août, le pouvoir se devait aussi de reconnaître la mort de 114 personnes et l’hospitalisation de 722 blessés et la disparition de 85. Le funeste décompte n’est pas terminé. Le même jour, le général Shi Luze, chef d’état-major de la région militaire de Pékin – la capitale se trouve à quelque 140 kilomètres de cette ville de 14 millions d’habitants –, était contraint de reconnaître que plusieurs centaines de tonnes de matériau hautement toxique se trouvaient entreposées en deux points du site. La presse chinoise, pourtant étroitement contrôlée, avait déjà indiqué la présence de 700 tonnes de cyanure de sodium. Les médias internationaux suivent cet «accident industriel» difficile à camoufler. D’autant plus que dans cette zone sont installées Toyota et Renault. Les parcs de voitures qui flambent en témoignent.
Août 6
L’affrontement inévitable, par Pierre KHALFA.
Publié le jeudi, 6 août 2015 dans Point de vue
La signature le 13 juillet d’un accord mettant la Grèce sous tutelle et imposant des mesures d’austérité inouïes constitue une débâcle politique pour un gouvernement qui avait été élu pour restaurer la souveraineté populaire et en finir avec les politiques néolibérales. Quelles leçons peut en tirer pour l’avenir la gauche de transformation sociale et écologique ? Quatre points sont à souligner.
Août 5
Grèce : Alexis Tsipras s’explique : « Le peuple grec a tenté de s’échapper de la prison de l’austérité. Rattrapé, il a été placé à l’isolement «
Publié le mercredi, 5 août 2015 dans Point de vue
Afin de bien comprendre les débats qui agitent Syriza en ce moment et qui intéressent toute la gauche radicale, nous publions cet interview d’Alexis Tsipras. Le 29 juillet, le Premier ministre grec s’exprimait longuement à l’antenne de Sto Kokkino. L’entretien, conduit par Kostas Arvanitis, le directeur de cette radio proche de Syriza, offre un éclairage inédit sur cinq mois d’une négociation aux allures de guerre d’usure avec les créanciers d’Athènes et les « partenaires » européens. Avec l’autorisation de nos confrères, nous en publions ici la retranscription intégrale.
Parlons de ces six mois de négociations. Quel bilan en tirez-vous ?
Alexis Tsipras. Il faudra en tirer les conclusions de façon objective, sans s’avilir ni s’auto-flageller car ce fut un semestre de grandes tensions et de fortes émotions. Nous avons vu remonter en surface des sentiments de joie, de fierté, de dynamisme, de détermination et de tristesse, tous les sentiments. Je crois qu’au bout du compte si nous essayons de regarder objectivement ce parcours, nous ne pouvons qu’être fiers, parce que nous avons mené ce combat. Et parce que les combats perdus d’avance ne sont que ceux que l’on ne livre pas. Nous avons tenté, dans des conditions défavorables, avec un rapport de force difficile en Europe et dans le monde, de faire valoir la raison d’un peuple et la possibilité d’une voie alternative. Au bout du compte, même si ces rapports de forces étaient déséquilibrés, même si les puissants ont imposé leur volonté, ce qui reste c’est l’absolue confirmation, au niveau international, de l’impasse qu’est l’austérité. Cette évolution façonne un tout nouveau paysage en Europe. L’Europe n’est pas la même après le 12 juillet. Quand Jürgen Habermas lui-même affirme que l’Allemagne a détruit une stratégie de cinquante ans, une stratégie de l’imposition par la persuasion et non par la force, je pense que ce sont des mots qu’il nous faut écouter.
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Août 4
La fin de l’Europe. Cédric DURAND
Publié le mardi, 4 août 2015 dans Notre Economie et la leur
Dans cet article initialement paru sur le site états-unien Jacobin, Cédric Durand montre que la crise en Grèce s’inscrit dans un mouvement de désintégration du projet européen.
Cédric Durand est économiste à l’université Paris-13 et enseigne à l’EHESS. Membre des Economistes attérés et du comité de rédaction de Contretemps-web, il est l’auteur du livre Le capital fictif (Les Prairies ordinaires, 2014), et a coordonné l’ouvrage En finir avec l’Europe (La Fabrique, 2013).
Du point de vue européen, l’effondrement financier de 2008 ne fut que le prologue d’une crise continentale généralisée. La débâcle financière de fabrication états-unienne a déclenché une chaîne complexe d’événements inattendus à travers le Vieux Continent, contaminant toutes les sphères de la vie sociale et débouchant sur un paysage radicalement nouveau, en proie aux turbulences politiques et économiques.
Comme le déclarait il y a quelques mois Ada Colau, la maire nouvellement élue de Barcelone à la tête d’une coalition inspirée des Indignés :
« De cette crise, personne ne sortira comme avant. Ce qui nous attend, c’est, au choix, un horizon féodal, avec une augmentation brutale des inégalités, une concentration sans précédent des richesses, de nouvelles formes de précarité pour la majorité des citoyens. Ou alors, une révolution démocratique, où des milliers de personnes s’engagent, pour changer la fin du film ».
Août 3
Échelle du monde, crise de civilisation, peuple et luttes. Philippe ZARIFIAN
Publié le lundi, 3 août 2015 dans Point de vue
Voici ci-dessous, un texte que j’ai écrit en 2005 et qui me semble rester d’actualité.
Philippe ZARIFIAN
Échelle du monde, crise de civilisation, peuple et luttes.
1. Crise de civilisation ?
Nous avons l’impression – mais nous sommes loin de pouvoir entièrement le rationaliser – que nous vivons une crise d’une profondeur considérable. Nous risquons bien davantage de la sous-estimer que de la surestimer. Quelque chose meurt, dans la trajectoire de la civilisation occidentale, elle-même devenue beaucoup trop influente pour ne pas entraîner dans son sillage les autres espaces civilisationnels.
Meurt d’abord, mais selon d’incessants soubresauts, à la manière d’un dragon blessé, tout le systémisme économique, toute l’énorme machinerie fonctionnelle que le capitalisme, comme rapport social, a engendré. Ce que Deleuze qualifiait d’axiomatique, régulant des flux sans codes et sans territoires, est aussi un vaste mécanisme fonctionnalisant la vie humaine, lui assignant place, rôle, résultats, finalités, et rejetant tout ce qui n’est pas fonctionnellement utile dans une période donnée.
Marx a visé juste en parlant des capitalistes comme des « fonctionnaires » du capital, ou encore en les désignant comme « porteurs » du capital. Le systémisme n’aura pas été un choix théorique, mais une analyse lucide de la « mise en système » d’un fonctionnement qui ne répond à aucune volonté spécifique, qui s’auto-entretient avec une formidable efficacité, un vaste automate auquel jamais personne, dans les phases antérieures de notre civilisation, n’aurait pu penser.
Certes, il aura fallu que certaines passions correspondantes se développent et prennent de l’ampleur socialement : le culte protestant du travail, l’appât du gain, voire la morale utilitariste.
Mais elles n’ont jamais été centrales.
Août 1
Syriza (Grèce) : « Nous faisons face à une lourde défaite ; à l’effondrement d’une stratégie particulière », par Antonis Ntavanellos
Publié le samedi, 1 août 2015 dans A Gauche. . . toute !