Publié le
mercredi, 26 octobre 2016 dans
Libertés
Depuis plusieurs jours et plusieurs nuits, les policiers défilent dans les rues sans déclaration préalable, pour certains cagoulés, voire avec leurs véhicules de fonctions, leurs insignes et parfois leurs armes de service. Depuis le 25 octobre 2016, ils ont choisi de se rassembler devant les Palais de Justice à l’appel de certains de leurs syndicats (ALLIANCE, UNSA).
Ni le caractère dramatique de l’événement déclencheur de ce mouvement, ni les difficultés avérées des conditions de travail de nombre de policiers, ne rendent acceptable cette volonté désormais officielle d’intimider l’institution judiciaire.
Les revendications portant sur les moyens matériels (commissariats, voitures, équipements de protection) ou sur les conditions de travail (RTT, congés, sous-effectifs, paie), laissent place à une explosion des revendications politiques à l’égard, notamment, de la magistrature, taxée de faire preuve de « tolérance, complaisance, laisser-aller, laxisme », mais également à l’égard des avocats, « complices de ce laxisme ».
Au mépris de l’indépendance nécessaire de la Justice et de la séparation des pouvoirs, ces actions ont manifestement pour objectif d’exercer une pression en faveur d’une politique pénale toujours plus répressive et d’inciter le gouvernement à brider davantage la magistrature.
Contrairement aux affirmations policières, les statistiques, les chiffres record de la surpopulation pénale, montrent que l’institution judiciaire n’est pas, épargnée par cette tendance sécuritaire et fait au contraire preuve d’une surdité grandissante aux questions sociétales à l’égard desquelles le tout carcéral serait l’unique et utile réponse.
Au demeurant, le rôle de la justice n’est pas de tenter d’apaiser une soif inextinguible de répression et de vengeance, que se plait à aviver l’extrême droite sous toutes ses formes.
Face à cela, les politiques ne semblent avoir d’autre réaction que de se montrer tolérants, compréhensifs, et de se contenter d’assurer que les auteurs d’actions contre les policiers seront sévèrement punis.
Cette attitude du pouvoir, oublieuse notamment de ce que le Président de la République est constitutionnellement le garant de l’indépendance de l’autorité judiciaire (article 64 de la Constitution), est symptomatique du glissement des gouvernants vers une logique de jusqu’au-boutisme sécuritaire.
Le fait que ces réactions policières surviennent peu de jours après qu’ait fuité la phrase du Président de la République sur les magistrats interroge également sur le positionnement du premier d’entre eux.
Quand certains tracts, laissés sur les murs des tribunaux, proclament « Policiers agressés – République en danger », il est utile de rappeler que si les agressions de policiers mettent en danger les policiers, et affectent le maintien de l’ordre, ce sont les manifestations illégales de policiers et leur tentative d’intimidation de toute l’institution judiciaire qui mettent, elles, en danger la Démocratie et l’État de droit.
le 25 octobre 2016
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