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LETTRE OUVERTE A MONSIEUR EMMANUEL MACRON. . . Tribune libre de Jérôme VIALARET

Publié le samedi, 3 mars 2018 dans Langues Régionales et minoritaires, Libertés, Point de vue

LETTRE OUVERTE A MONSIEUR EMMANUEL MACRON

Monsieur le Président,

    Il y a quelques jours, le 21 février, cela fit exactement deux mois que, renvoyés aux urnes manu militari par le pouvoir madrilène, les électeurs catalans accordaient leur confiance, une nouvelle fois, aux élus indépendantistes. Ceci en « riposte » supposée (et espérée) au vote de même nature du 1er octobre 2017 où, sous le matraquage de la Guardia Civil, les catalans avaient voté en masse pour les mêmes. Les chancelleries européennes avaient applaudi, unanimes, à la réaction virile des autorités centrales, et salué l’organisation forcée d’une nouvelle consultation. Las ! Celle-ci n’a pas donné ce que nos élites espéraient, puisque le résultat fut comparable à celui qui était sensé, dans leur esprit, « corriger » le précédent.

Donc les catalans, matraqués, spoliés de leur droit à      l’autodétermination, prétendument reconnu par tous, au premier rang desquels la « patrie autoproclamée des droits de l’homme », comme fondamental et inaliénable, donc les catalans, disais-je, emprisonnés, bâillonnés, exilés pour pouvoir s’exprimer en la personne de leurs représentants, sommés de revoter… et votant la même chose, doivent se taire, se soumettre, se déjuger, courber l’échine et baiser le knout qui les fouette…

Cela devrait nous rappeler, peut-être, qu’un pays soumis pendant quarante ans à un régime dictatorial, quels que soient les miracles – réels – de la « movida », garde peut-être en lui le germe délétère de la matraque, de la violence et de la négation de la voix des peuples.

    Mais cela, nous concernant, nous alarme sur autre chose : personne, dans les sphères dites « hautes », ne semble s’alarmer. Bien plus, on vous a vu, Monsieur le Président, saluer chaleureusement M. Manuel RAJOY, contempteur de la Catalogne, et serrer la main avec une chaleur identique au roi d’Espagne, Felipe VI, lors d’une récente rencontre internationale.

Monsieur le Président, comment interpréter une telle proximité ? Cela ne vous dérange pas que des personnalités politiques, dont le seul tort est d’avoir défendu l’indépendance de leur nation, se retrouvent en prison, ou exilés volontaire en Belgique ou, depuis hier, en Suisse ? J’ai entendu dire, et cela depuis mon plus jeune   âge, que la France défendait les peuples où qu’ils soient. J’y ai cru.

Les peuples sont naïfs, et j’ai le tort d’appartenir au mien (le vôtre ?) par toutes les fibres de mon corps. J’en partage donc la naïveté. On m’aurait donc menti ? Oui, assurément, on m’a menti. La France, au nom, sans doute, de la non-ingérence dans les affaires « des autres », ne dit rien, s’abstient, ferme les yeux… et, par le truchement de vos poignées de main, approuve.

Vous dites donc oui, Monsieur le Président, à l’emprisonnement d’opinion. Vous dites donc oui,

Monsieur le Président, à un mandat d’arrêt international (opportunément retiré en décembre… mais vite réactivé il y a quelques jours !) contre une personne démocratiquement élue, sur la base d’un programme qui annonçait la couleur d’emblée. Vous dites donc oui, Monsieur le Président, à la négation répétée du vœu d’un peuple pourtant démocratiquement consulté… et par les premiers opposants au voeu d’abord consacré.

Vous dites donc non, Monsieur le Président, à ce qu’est la France. A ce qu’elle dit d’elle à l’extérieur.

A ce qu’elle continue, vaille que vaille, à représenter dans le monde.

Un de vos prédécesseurs (à un rang moindre, j’en conviens) faisait litière de l’intervention cosaque et meurtrière des armées russes en Pologne par ce mot fameux : « l’ordre règne à Varsovie ».

      Vous nous invitez à nous réjouir, Monsieur le Président, du fait que l’ordre règne à Barcelone. Au prix d’un crachat à la face du peuple catalan, et de toutes les libertés publiques dont notre pays se dit comptable.

Pardonnez-moi, Monsieur le Président, de ne pas m’en réjouir.

Et d’avoir honte de voir que le silence de la France concourt à la situation présente, quand son esprit, quand son génie, quand son histoire, quand ses valeurs devraient hurler à ce que les bâillons tombent, que les prisons s’ouvrent, et que ceux qui craignent pour leur liberté soient assurés que notre pays s’érige, et s’érigera toujours, en sentinelle de la liberté, de leur liberté, et de celle des peuples qui souffrent, et qui attendent, toujours et avec espoir, sa voix.

Le 1 mars 2018

Jérôme VIALARET

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