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Performance dans la permanence : Derrière la bombe, toujours le mahométan . . . Ici, on cause du double attentat d’Oslo et de l’île d’Utoeya.

Publié le dimanche, 24 juillet 2011 dans Non classé

L’émotion qui nous étreint et la solidarité que nous affirmons avec le peuple norvégien et, singulièrement, avec la jeunesse et la gauche du parti travailliste particulièrement frappées par la tuerie d’Utoeya appellent une vigilance renforcée et une mobilisation sans faille contre l’extrême droite et ceux qui, à droite, nourrissent les « identités meurtrières », selon le titre tellement à propos de Denis Sieffert dans la dernière livraison de Politis, et un regard lucide – donc critique- sur l’irresponsabilité des médias. C’est l’objet du billet pamphlétaire de Mathieu Colloghan, dessinateur, maquettiste et rédacteur à Rouge et Vert, le journal national des Alternatifs, que nous publions ci-dessous.

Qu’en voilà donc une belle, de ces performances rédactionnelles dont les médias ont parfois le secret ! Ici, on cause du double attentat d’Oslo et de l’île d’Utoeya. 

Les premières hypothèses, sorties quasiment en direct (c’est que l’écriture automatique ne nécessite nul délai) se sont portées sur une « probable piste islamiste », et plus particulièrement sur Ansar Al Islam-Al Qaida en Irak. Les premières lignes éditoriales se sont dessinées avec célérité. Il s’agissait pour les dangereux fondamentalistes de punir la Norvège pour sa participation à l’action internationale en Irak. Bon, en Irak ou en Afghanistan, hein ! Qu’importe que les Norvégiens, présents en Afghanistan ne soient pas impliqués en Irak car, ma p’tite dame, les raisons sont ailleurs. Ce n’est, en effet qu’à moitié une surprise, cet attentat, vu que la Norvège, elle ne fait qu’accueillir avec un terrible excès d’une laxiste permissivité tous les réfugiés pseudo-politiques qui ne sont que de vulgaires mollahs barbus venus faire des bases arrière d’Al Qaida en Europe. Et d’ailleurs, ma chère, c’est connu, la Norvège était l’une de ces bases arrière, à Ansar Al Islam, alors, après, faut pas s’étonner…

Mais avant même qu’Eric Zémour n’ait eu le temps de rédiger un édito sur la menace de la 5e colonne de mahométans dans nos écoles et nos cités, voilà qu’apparaît sur la chaîne nationale norvégienne NRK la trogne du terroriste. Or le visage Anders Behring Breivik, un « Norvégien de souche » ( dixit France 2) ne colle pas des masses avec l’imagerie de la menace barbue. Un gars blond, avec la tête de psychopathe qui te condamne à jouer du banjo dans Délivrance. Et le monsieur est donc pas mal facho, voire un peu nazi, et très religieux, façon chrétien fondamentaliste.Et il a même commis de la littérature pour expliquer qu’il fallait bouter le non-blanc et tout ce foutraque cosmopolite, et surtout le musulman, hors de Norvège et qu« Avant de commencer notre croisade, nous devons faire notre devoir en décimant le marxisme culturel ».

Normalement, les rédactions auraient dû organiser un virage rédactionnel à 180°. Peut-être même avec un début de mea-culpa pour les premières hypothèses avérées totalement farfelues. Pour les rédacteurs les plus feignants, il eut été possible de remplacer « fanatiques musulmans » par « fanatiques chrétiens » .Cela aurait pu donner quelqu’amusants « Et il faudra bien s’interroger sur l’incompatibilité entre le fondamentalisme chrétien et nos valeurs de tolérance issues du siècle des Lumières ». Des tables rondes de Calvi pour se demander gravement « Peut-on être chrétien fondamentaliste et européen ? », un Téléphone sonne avec des barbouzes spécialistes en réseaux catholiques intégristes etc …

Et non.Comme prévisible, et comme prévu, chaque fois que l’on bascule du terrible attentat islamiste au terrible attentat d’extrême-droite, les recherches en « ramifications internationales » sont abandonnées au profit de la thèse d’un acte isolé commis par un barjot.

Et pour ce qui est de la menace que faisait peser sur nous l’immigré musulman que dans son excès de laxisme et patati et patata ?
Là, il faut noter la performance dans la permanence : c’est toujours (un peu) à cause d’eux.

Ainsi, Quentin Dickinson, au journal de 13h de France Inter le 23 juillet, lendemain du bain de sang évoque les motivations racistes du brin de zinc norvégien, et, plus généralement de l’extrême-droite dans les pays nordiques : « S’agissant de l’Islamophobie, elle est l’enfant inévitable de la politique menée depuis les années 1960 par les gouvernements sociaux-démocrates dans les trois royaumes scandinaves et en Finlande. Il s’agissait d’accueillir sans limitation du nombre toute personne originaire du tiers-monde et se présentant comme réfugier politique. »

On reprend en détail, parce que là, c’est du lourd :

• L’islamophobie n’est pas l’expression d’une haine raciale à combattre mais plutôt une réaction naturelle, voire légitime à des politiques excessivement permissives. En d’autres termes, si on n’aime pas les Arabes, c’est surtout parce que y en a trop.

• Car, c’est connu : dans les pays nordiques, y a qu’à se « prétendre réfugié politiques », et hop ! T’as les meilleures places en crèches, un super appart’en HLM et j’te parle même pas du bruit et de l’odeur. Qu’importe le réel, les contraintes de plus en plus lourdes entourant le séjour d’étrangers dans les pays nordiques, les nécessaires « preuves d’intégration », les cours de langues et de civilisation obligatoires etc… Pour Dickinson, c’est la permissivité des sociaux-démocrates scandinaves qui est cause de tout ça, et puis c’est tout.

Attention, la citation de Dickinson ne s’arrête pas là. Ça aurait été dommage de la tronquer et de se priver de la suite : « La politisation radicale de ces populations immigrées par la suite alliée à la crise économique dont souvent elles sont les premières victimes ont contribué à les dresser contre les autochtones ».
Compris ? C’est à cause de la crise économique, un peu, et surtout la politisation des immigrés que ces derniers se sont dressés contre les autochtones. Et ouhai !La monté de l’extrême-droite, l’imprégnation raciste d’une partie de la population norvégienne, le rejet violent de l’étranger … N’allons pas chercher là dedans le purin dont s’échappe le fumet raciste norvégien. Le problème du racisme en Norvège, c’est celui que pose l’hostilité des immigrés envers les autochtones. Ben oui ! Et ça ouvre des horizons, cette souplesse éditoriale : ainsi, je m’demande s’il ne faut pas parler d’une certaine hostilité des immigrés en France contre Marine Lepen et les militants du Front National. Faudrait pas s’étonner si, à l’avenir, ça ne finissait par entraîner des réactions violentes de la part de nazis français, n’est-ce pas.
Ce qui prouve qu’il n’y a pas de trêve estivale pour un journalisme de qualité !
Mathieu Colloghan

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