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La Crise vers une euroguerre mondiale , comme d’habitude ? Alain JOXE (tribune libre)

Publié le jeudi, 26 février 2015 dans Non classé

            Alain-Joxe-deuxIl est temps de faire le point sur un problème sans solution facile mais qui mérite d’être bien posé. L’Europe sent monter la guerre, en  Méditerranée,   moyen-orientale, en Afrique sahelienne  , en Mer Noire ukraino-russo- caucasienne. Dans la mesure ou nous sommes au milieu du gué, en matière de crise financière, économique, politique et religieuse, ces quatre types de crises, qui nous bouchent l’horizon, étant inégalement mixées sur le terrain des guerres , ce contexte n’est pas loin de ressembler à une guerre mondiale rampante.

            1°) On peut bien dire que le système des Nations unies ne fonctionne plus, pour arrêter le massacre de Gaza , la guerre de Libye du Mali et  du Nigeria ,  le démocide syrien par  la dictature  d’Assad,    la guerre offensive barbare de Daech, en Iraq et en Syrie On peut dire aussi  que le système de sécurité internationale de l’Union Européenne,  surcodé par l’OTAN, est en échec en Ukraine.

            2°) On pouvait voir, dès 2011, que la « guerre mondiale de la crise mondiale » ne pourrait pas ressembler à la 2° guerre mondiale de la crise de 29,    Le « nouvel Hitler » ne serait  pas visible, sous le masque des USA ou de Poutine. Aucun président ne déclencherait les hostilités en tant qu’industriel  conquérant  du monde. Les « guéguerres » en question communiquent entre elles, sur le terrain, par des voisinages géographiques, économiques, religieux ou linguistiques, ou plusieurs de ces désinences qui,  se surajoutant, créent de la complexité chaotique. Mais, contrairement aux guerres de naguère,  le conflit frontalier ne définit  pas une guerre  entre états, mais bien une série de guerres irrégulières mettant en cause l’ensemble de la définition frontalière de la souveraineté

            3°) Cette décadence des Etats quant à  leurs limites ne peut pas surprendre : cette mutation tient au fait  que le pouvoir du système financier  global, devenu hégémonique, est délocalisé.    Les états privés de politique sociale autonome  n’ont plus que des stratégies sécuritaires  en défense d’intérêts entrepreneuriaux transfrontaliers instables.

La nouvelle classe financière dominante mondiale rejette  toute « législation globale » mimée encore par l’ONU et par conséquent se veut dotés d’une liberté délinquante secrète propre aux maffias anciennes et modernes. Les guerres ne sont plus des guerres entre états.

            4°) Les États, sont tous  venido a menos ou  failed states , à des degrés divers, et,   sous l’influence des stratégies d’entreprises, laissent s’instaurer  des doctrines locales qu’on devrait appeler « insécuritaires ». Qu’ils le « veuillent » ou non  les Etats  sont appelés à déclencher   des répressions sans limites pour des dettes sans limites de populations sans limites.  Cette dégradation n’est pas propre aux pays ex-coloniaux ; elle est visible aussi en Europe, où les marchés financiers opèrent , à travers des institutions propres à l’Union Européenne, pour éliminer, par la discipline de la Banque Centrale Européenne,  toute action des états membres non conforme aux principes d’un néolibéralisme offensif

            5°) Les classes dominantes, délocalisées et sans feu ni lieu, se conduisent naturellement de manière irresponsables, en croyant dur comme fer que la croissance et la concentration du profit est la garantie d’un développement harmonieux. Autrement dit cette « religion » néolibérale suscite des ripostes religieuses violentes et irresponsables :  l’islamisme djihadiste criminel se dresse d’abord symboliquement dans l’espace délocalisé sans frontières du système financier avec AlQaida puis sur un carrefour frontalier transétatique avec Djaech. Deux religiosités globales devenues folles.

            Face à ce phénomène d’apparence météorologique non contrôlable , la combat politique s’enfonce dans une représentation d’ombres chinoises où des personnages  traditionnels continuent à jouer à la souveraineté. Empêcher le chaos par une grosse guerre fédérant les petites pourrait être une solution, du type 2° guerre mondiale Cependant deux facteurs jouent contre la grande guerre :

1) On manque d’États militaristes capables de mobiliser les peuples car le système des marchés financiers transnationaux est en contradiction avec l’autonomie militaire qui serait politiquement nécessaire à la pris en charge par les nations d’une « vraie guerre ». L’Allemagne est pour ainsi dire interdite de guerre par sa constitution et la décadence extrême de la Bundeswehr est  en quelque sorte constitutionnelle, en souvenir des deux guerres mondiales. La France est le seul état qui se soit donné un potentiel d’opérations extérieures et qui s’en sert concrètement depuis les deux dernières présidences, mais elle est au bout de ses possibilités, elle ne vise pas du tout une capacité de guerre en Europe  et continue à diminuer le budget de la défense. Les Anglais  ne sont supporters d’actions militaires externes qu’avec articulation au pouvoir militaire américain

 2) Pour neutraliser le glissement vers ce qui peut rester une prolifération des guerres locales ou une coagulation en guerre régionale il faudra un débat stratégique et un soulèvement politique  capable de restaurer un  système transétatique régional , ou même une « internationale » des peuples, agissant comme système de paix. Il y a précisément maintenant   un contre mouvement qui s’amorce (Grèce, Espagne) et  refuse au nom de la volonté populaire de s’enfoncer d’avantage dans la démolition de la démocratie par les bureaucraties néolibérales et la mise à la décharge de l’idée même de socialisme  en Europe

Deux tournants doivent être pris pour que cette option soit cohérente

            ‑ c’est seulement en mettant l’OTAN entre parenthèses et en l’éloignant des frontières de la Russie et en annulant ses compétences importées d’Amérique dans l’organisation européenne d’un système sécuritaire & militaire répressif, qu’on pourra maîtriser à la fois la version otanienne du soutien à l’offensive néolibérale vers l’est et la version poutinienne d’une défense contre-offensive visant la restauration de la frontière de l’URSS et rajeunissant la trouille de la Russie

            ‑ c’est seulement en repoussant définitivement le traité de grand marché transatlantique qu’on pourra tenter une sécession de la défense Européenne et restaurer une  auto-nomie face à la menace de guerre.

            Il ne faut pas attendre que la guerre mondiale éclate : elle est déjà commencée mais sans chefs. Et donc l’Europe  pourrait redevenir  une identité politique, géographique et stratégique autonome des régimes post soviétiques mafieux et  des Etats Unis d’ultra droite qui soumet l’Union Européenne, par l’OTAN, aux représentation et aux normes entrepreneuriales et militaires de la religion néo-libérale

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