Le projet libéral d’Accord Transatlantique face à la démocratie
Avec la préparation d’un accord transatlantique de commerce et d’investissement, l’Union européenne et les États-Unis préparent, dans le déni démocratique, une nouvelle fuite en avant libérale. Mais la mobilisation commence.
Les technocrates américains et européens sont bien loin de toute analyse critique du système économique et de ses crises ! Ainsi, depuis juillet 2013, l’Union européenne – dont la Commission a été mandatée par tous les États membres – et les États-Unis préparent une fuite en avant des politiques libérales, en négociant l’ouverture d’un large marché de libre-échange. Cet accord, qui faisait l’objet cette semaine d’un round de discussion à Washington, est intitulé Partenariat transatlantique de commerce et d’investissement (PTCI, ou TAFTA). Il est prévu qu’il aboutisse en 2015.
Une nouvelle tentative de tout libéraliser
Comme pour les précédents projets destinés à accentuer la libéralisation des échanges, les négociateurs sont discrets, les textes opaques et tout est fait pour ne pas mettre les enjeux en débat dans les États membres. Comme d’habitude, l’habillage et les formules sont élégants, et il faut lire entre les lignes pour comprendre ce qui se joue. La Fondation Copernic, ATTAC, l’AITEC, mais aussi par exemple le militant altermondialiste Raoul-Marc Jennar s’attachent à les décrypter (voir les liens ci-dessous).
Nous sommes dans le prolongement des tentatives d’imposer la libéralisation de l’investissement pour les firmes transnationales, par exemple sous la forme de l’Accord multilatéral pour l’investissement (AMI), dont la mise en place avait échoué en 1998, ou sous la forme de l’Accord commercial anti-contrefaçon (tentative ratée en 2012, après la dénonciation massive de ce projet liberticide). La nouvelle méthode consiste à favoriser des accords transnationaux plutôt qu’un accord unique d’envergure mondiale, mais l’objectif est le même : développer un « régime commercial qui serve les intérêts particuliers qui dominent depuis longtemps la politique commerciale occidentale », selon les termes du prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz.
Avec la présente négociation, il s’agit d’abord de lever ou d’affaiblir les barrières douanières, considérées comme des obstacles au commerce et à la prétendue « concurrence libre et non faussée ». Comme l’indique ATTAC, cela conduirait, par exemple dans le domaine de l’agriculture, à encourager la généralisation des modes de production industriels les plus compétitifs, importés des États-Unis, au détriment de la qualité des productions et des exigences écologiques. Ce qui irait à l’encontre de toutes les tentatives de promouvoir des circuits-courts, de relocaliser les productions, de favoriser la biodiversité, etc. La volonté de baisser les droits de douanes concernerait tout particulièrement le domaine des services publics, que les libéraux veulent à tout prix mettre à leur main, c’est-à-dire à la fois contrôler et privatiser. À terme, les secteurs qui relèvent (encore) dans de nombreux pays du secteur public seraient ouverts à la concurrence, empêchant par exemple une collectivité locale de pouvoir choisir ses prestataires d’après des exigences de qualité ou de proximité.
Changer l’ordre juridique
En ligne de mire : tout ce qui, dans les législations nationales, oblige à respecter des normes sociales et environnementales. Ce qui témoigne d’une part du rôle actif que jouent encore les États, d’autre part de l’enjeu de la souveraineté populaire.
Il s’agit ensuite de mener une bataille sur les normes, en mettant en place un système normatif indépendant des juridictions existantes. Telle multinationale qui s’estimerait lésée par une politique nationale, ou par exemple par les clauses d’un marché, pourrait faire appel à des mécanismes et des instances privés mettant aux prises les acteurs économiques et tel ou tel gouvernement. En ligne de mire : tout ce qui dans les législations nationales limite les profits, oblige à respecter des normes sociales et environnementales. Ce qui témoigne d’une part du rôle actif que jouent encore, et que pourraient jouer davantage des politiques volontaires des États, d’autre part de l’enjeu majeur de la souveraineté populaire dans ces domaines.
Le périmètre juridique dépasserait largement celui du commerce pour concerner les droits de propriété intellectuelle des acteurs économiques privés, les brevets… Par exemple, concernant les OGM, en l’état actuel des rapports de force internationaux, l’imposition de normes internationales résultant de tel ou tel conflit arbitré en faveur d’une multinationale pourrait obliger les États à autoriser leur commercialisation.
Au total, cela dessine un développement des conflits entre les normes nationales, élaborées à partir des lois votées par les Parlements nationaux, voire par le Parlement européen, et des règles imposées par la mise en place d’un « droit des investisseurs », au profit bien sûr de ce dernier. On est encore dans la logique hyper-libérale selon laquelle il existerait une « liberté d’investir » qui serait contrecarrée par le droit, l’action des États… et en définitive par les exigences citoyennes.
Qui décide ?
Et si, dans les prochains mois, l’affaire était démasquée et devenait un des thèmes clefs de la campagne des élections européennes ? Et si l’exigence d’un arrêt de la négociation et d’une consultation des citoyens s’imposait ?
Face à ce projet, la mobilisation commence à s’amplifier : appels nationaux et locaux, débats publics, journée d’action à Bruxelles où se tenait ce jeudi un sommet européen… Une pétition demandant l’arrêt des négociations vient d’ailleurs d’atteindre les 300 000 signatures en Allemagne. La légitimité même des discussions en cours, et le principe d’un accord poursuivant les objectifs des traités précédents, sans l’avis des peuples ou contre eux, est en cause. Et si, dans les prochains mois, en France et dans toute l’Europe, l’affaire était démasquée et devenait un des thèmes clefs de la campagne des élections européennes ? Et si l’exigence d’un coup d’arrêt à ce projet libéral et d’une consultation des citoyens s’imposait ?
source : http://www.cerisesenligne.fr/article/?id=4285
Affûtons nos arguments !
ATTAC (Association pour la taxation des transactions financières et pour l’action citoyenne)
AITEC (Association internationale de techniciens, experts et chercheurs)
aitec.reseau-ipam.org/
Fondation Copernic
http://www.fondation-copernic.org/spip.php?article1029
http://www.fondation-copernic.org/spip.php?article1027
La quadrature du Net
http://www.laquadrature.net/fr/TAFTA
Décryptage par Raoul Marc Jennar du mandat de négociation du PTCI
Les personnes désireuses d’écouter la conférence que Raoul-Marc JENNAR a donnée à Toulouse peuvent le faire : voici le lien des Amis du Monde diplomatique de Toulouse :
http://amdtoul.over-blog.com/2013/12/le-grand-march%C3%A9-transatlantique-ue-usa.html
Et, toujours sur le blog de Raoul-Marc JENNAR : http://www.jennar.fr/
http://www.jennar.fr/?p=3227#more-3227
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