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Tendances et contre-tendances. Bruno DELLA SUDDA

Publié le mercredi, 30 octobre 2013 dans éditorial, Kézako Les Alternatifs, Notre Projet, Rouge et Vert, Social

IMG_6225Le vent mauvais qui souffle avec la persistance de la crise globale, les difficultés des mobilisations et la montée de l’extrême-droite, est une donnée qui semble s’installer de manière durable. Il constitue maintenant un élément structurant du contexte politique et social à l’échelle européenne et pèsera lourd lorsque s’ouvrira, à l’approche du scrutin européen, le débat sur les perspectives d’une UE en pleine déconfiture et touchée de plein fouet par la crise mondiale.

A l’échelle de l’Europe comme à l’échelle de la France, la crise ne se limite pas à ses dimensions économique et financière, et à ses conséquences sociales dramatiques, même si ce sont celles-ci qui sont les plus visibles avec l’aggravation du chômage et de la précarité et la multiplication des plans de licenciements. La crise de la démocratie représentative continue, le discrédit de la classe politique n’a jamais été aussi grand, à travers y compris -on s’en réjouira- le rejet des politiciens de droite cyniques et flattant le racisme, tels que Copé, incarnant parfaitement ce vent mauvais qui souffle si fort.

La crise écologique n’a trouvé aucune solution dans les conférences mondiales successives sur le climat et le dernier rapport du GIEC le confirme à sa manière : le modèle de croissance et de développement subi par les peuples n’est nullement remis en cause et même sous couvert de capitalisme vert, c’est ce modèle qui alimente la multiplicité des pollutions, le recul persistant de la biodiversité, le maintien et le renforcement de l’usage irresponsable et criminel du nucléaire doublé de la fuite en avant que constitue l’exploitation des gaz de schiste. A l’échelle européenne, la crise est  géostratégique  tant se précisent les effets délétères de la perte du rôle de premier plan joué par le vieux continent à l’échelle mondiale depuis cinq siècles.

Mais ce vent mauvais n’a rien d’un élément stable : des contre-tendances existent à l’échelle des sociétés, qui peuvent être un point d’appui pour un retournement de situation sur le plan politique et sur le plan social. Face à l’offensive capitaliste et patronale, les projets de type coopératif et de reprise de l’outil de travail par les salarié-e-s sous des formes diverses, qui pour nous ont à voir avec les aspirations autogestionnaires, sont certes minoritaires, mais ils ne sont plus de l’ordre de la rareté ou de l’exception.

Face aux grands projets inutiles liés à la conception de l’aménagement du territoire qui découle du  capitalisme productiviste, la mobilisation de Notre Dame des Landes est exemplaire, par l’écho rencontré, les forces qu’elle coalise, les alternatives qu’elle permet de dévoiler et les dynamiques écologiques et citoyennes qu’elle recèle.

Face aux dérives racistes et sécuritaires auxquelles participent sans vergogne la droite et une partie de la gauche dans le sillage du FN, des éléments de solidarité, de refus des discriminations et d’exigence d’égalité des droits s’expriment, d’abord dans la jeunesse scolarisée comme on l’a vu dans l’affaire Leonarda, qui fait office ici de révélateur.

Et après les propos de Valls dignes du FN, on a même entendu Daniel Cohn-Bendit, pour une fois inspiré, rappeler à juste titre que « dans les années trente, on parlait des Roms et des juifs de la même façon ». De la préparation de l’initiative unitaire en anniversaire de la « marche des Beurs » aux tentatives de rassemblement des réseaux de soutien aux sans-papiers jusque-là dispersés, des signes de remobilisation se multiplient.

Faute de projet alternatif et, pour l’instant, de mobilisations de masse débouchant ne serait-ce que sur des victoires partielles, l’idéologie du chacun pour soi et de la jungle capitaliste du tous contre tous a encore quelques succès. Mais ces succès pourraient être de faible durée. Ils ne peuvent entraîner l’adhésion du plus grand nombre, ils ne peuvent avoir un assentiment populaire.

Il y a donc des contre-tendances au vent mauvais actuel. Elles indiquent la voie à suivre, malgré la déception et le découragement bien compréhensibles face aux difficultés des mobilisations actuelles. De ce point de vue, à moins d’un rebond, ce qui ressemble à une défaite sans combat sur la question des retraites va laisser des traces. Une contre-réforme qui avait pourtant suscité un début de mobilisation le 10 septembre, et ce malgré la sidération provoquée par le fait qu’elle soit mise en œuvre par un gouvernement « socialiste« 

 

Même sur cette question emblématique des retraites, tout n’est pas terminé. Et le meilleur moyen de préparer ce rebond n’est-il pas de s’appuyer sur la contre-expertise produite par ATTAC et la Fondation Copernic, de rappeler que la retraite à 60 ans a été obtenue avec une richesse et une productivité bien moindres qu’aujourd’hui, de revenir sur le fond aux propositions alternatives, à la réduction massive du temps de travail comme élément central de la contre-offensive et du  « tous ensemble« ?

 

Bruno DELLA SUDDA  

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