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REVENDIQUER LA SECURITE SOCIALE PROFESSIONNELLE

Publié le dimanche, 5 juin 2011 dans Alter'actu, Notre Projet

Avec ce texte de Jean Louis LE BOUHRIS, contribution à notre Congrès de ROUEN (novembre 2010), nous proposons une illustration du texte de congrès sur un point particulier : la Sécurité Sociale Professionnelle.

En explicitant quel type de mesure a notre préférence, nous espérons stimuler le débat et la réflexion sur ce sujet en chantier.

 

REVENDIQUER LA SECURITE SOCIALE PROFESSIONNELLE

La gauche sociale libérale a encore été prise à contre pied par Sarkozy !  Cette fois-ci, par la promulgation du RSA.

Péniblement, la critique s’est focalisée sur le financement,  sans jamais s’attaquer à la logique des mesures avancées.

Cela se comprend aisément. Quand Jospin siffle la fin du mouvement des chômeurs, il se refuse à l’assistance, tout comme les proclamations de M Hirsch aujourd’hui.

Ils partagent cette même croyance, héritées du libéralisme économique, suivant laquelle chacun obéit à ses intérêts.

S’agissant des chômeurs : ″s’ils ne sont pas incités ou menacés, ils se vautrent dans l’oisiveté″.

Dés lors, les attaques les plus virulentes qui mettent en cause la logique à l’oeuvre proviennent d’intellectuels. Thibaut Gadjos, chargé de recherche au CNRS, dénonce ainsi l’opposition entre les pauvres que promeut le RSA: Il laisse entendre qu’il, y a deux sortes de pauvres:

 – d’un coté les laborieux, qui méritent d’être aidés

 – de l’autre ceux qui restent éloignés de l’emploi et qui doivent être abandonnés à leurs sort. .

Il n’ y a  rien de solidaire dans le RSA. Il n’est pas plus un progrès puisque, de l’aveu même de son concepteur, la première année un RMIste avec un boulot à plein temps y perdra,  les « intéressements  » précédents étant plus avantageux.

Cet aveu met à jour toute la logique du RSA. Au lieu d’être « un pied à l’étrier », c’est une trappe: « travailler peu pour gagner peu ».

Ainsi, dans la construction du RSA, un allocataire travaillant à plein temps au SMIC gagne 54 euros de plus quand pour un tiers temps de SMIC il touche 215 euros de mieux. A noter qu’avec un mi temps  (+151 euros) il ne parviendra au seuil de pauvreté de 882 euros. Il est probable, dans les faits, que nombre d’allocataires au RSA dépassent très légèrement ce seuil, faisant baisser les statistiques de la pauvreté.

En résumé cette incitation au travail qu’est le RSA vise à occuper les chômeurs dans la droite ligne de la politique de traitement du chômage.

Une telle déconstruction n’est pas faite à gauche qui préfère évoquer les risques d’abus et les effets pervers. Nous sommes, à gauche, dans une impasse si nous ne développons pas une autre logique.

Comment dénoncer et, dans le même temps,  revendiquer son extension aux 18-25 ans?

Comment être audible face à l’impératif de l’urgence: «  vous maintenez ces gens dans une misère insupportable »?

Opposer une toute autre logique face au travail et face et à la précarité qui peut s’énoncer ainsi : découpler la rémunération de la production.

La porte d’entrée concrète pourrait être la Sécurité Sociale Professionnelle.

Quelles que soient les différentes conceptions de celle ci : quasiment tous les syndicats et les partis de gauche évoquent ce terme, elles interrogent l’emploi au lieu d’adapter les chômeurs à l’activité.  Jean Gadrey, économiste, dans une tribune libre à L’Humanité (6 septembre 2008), met à nu la réalité des créations d’emplois : »les chômeurs ont avant tout besoin que l’économie créée des emplois décents ce qui n’est pas le cas« .

Néanmoins parmi les conceptions disparates, parfois pas très explicites, nous en soutenons une, élaborée par des intellectuels et des inspecteurs du travail, qui se veut un contrefort aux licenciements collectifs. Considérant que le salarié n’a pas à subir les aléas du capitalisme, la Sécurité Sociale Professionnelle dans cette version vise à maintenir le contrat de travail, la rémunération et le droits sociaux qui y sont associés lors de la période de chômage.

Ce moment serait à la charge du patronat et non de la société, ce qui est possible puisqu’il existe déjà l’AGS, interne au patronat, qui aide à la réinsertion des chômeurs.

– Puisque le chômeur est payé sans être au boulot, cette mesure sépare bien « production » et « rémunération. « 

– Puisque c’est le patronat qui prend en charge et non la société nous « changeons de paradigme » comme le soulignait une note Copernic de L.M Barnier. :: nous abandonnons la logique de solidarité au profit de celle de responsabilité. Au nom de tous les avantages de la société, dont profitent les entreprises comme les individus, (infrastructures, aides etc. .), celle ci doit désormais rendre compte de sa politique.

Cela change les perspectives du contrôle social qui jusqu’à présent pesait sur les seuls privés d’emplois.

C’est ainsi qu’une technique antifraude testée dans les CAF assimile les tentatives de fraude à de la subversion!

Le contrôle social, si nous nous emparions de cette revendication, s’exercerait aussi sur le patronat allégeant d’autant les pressions sur les chômeurs, « assistés et paresseux« .

Pour ces rasons la Sécurité Sociale Professionnelle est une petite révolution:. Certains y voient un moyen d' »interdire les licenciements », d’autres simplement une remise en cause de la subordination  du travailleur à son patron, base du salariat.

Pour autant cette révolution est à élargir, sauf à rester dans un terrible paradoxe. Conçue comme une réponse aux licenciements, et particulièrement aux licenciements boursiers, la Sécurité Sociale  Professionnelle  maintient un lien originel entre production et rémunération. Il  faut avoir produit, avoir été salarié donc être rentré dans la conception traditionnelle du travail et de son prix pour pouvoir y échapper.  Les chômeurs de longue durée, les stagiaires, tous ceux qui ne rentrent pas dans le formatage des embauches (pas de capacité, pas d’autonomie, pas de sens de l’adaptation)  restent, dans cette optique, livrés à la pauvreté, évincés de la création de richesses reconnue par la société.

Pour sortir de cette injustice et de ce terrible paradoxe, il y a nécessité à pousser les feux et à travailler Sécurité Sociale Professionnelle et revenu.

Lors de l’Université des Alternatifs à Auch en 2006, pour beaucoup, intervenants extérieurs comme cessionnaires, il y avait continuum et non opposition entre les deux approches.

La plate forme revendicative des associations de chômeurs et précaires : « Pour une garantie de revenu et la continuité des droits » est une première tentative suffisamment aboutie pour obtenir le soutien de syndicats comme Solidaires ou la Confédération Paysanne

NB: les numéros 246 et 248 (13/10 et 1/12/2006) de « Rouge et Vert » donnent compte rendu des discussions de l’Université d’été de Auch (en 2006) sur ces questions.

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